Center for Research on Environment, Human Security & Governance


Le NRCS et la GIZ, avec le soutien de nombreux partenaires (tels que l’IRD, le CWF et certaines universités marocaines), ont organisé avec succès deux congrès internationaux sur « l'Intégration de l'agriculture durable, du développement rural et des écosystèmes dans le contexte de l'insécurité alimentaire, du changement climatique et de la crise énergétique » (2009), et sur le « Changement climatique, agriculture, alimentation, pêche et écosystèmes : Réinventer la recherche, l'innovation et la politique pour une croissance écologiquement et socialement équilibrée » (ICCAFFE-2011). Ces rencontres scientifiques, organisées au Maroc et impliquant plus de 300 participants et 50 pays, sont de plus en plus reconnues comme un forum multinational précurseur et distingué qui a offert l’opportunité de débattre les questions « glocales » à partir d'une approche interdisciplinaire et multidimensionnelle et une perspective Nord-Sud et Sud-Sud.

Il a été initialement conçu pour mettre en contact et en réseaux des chercheurs, des experts, des décideurs, des praticiens et des acteurs non-étatiques issus de différents disciplines, institutions, entreprises et réseaux de toutes les contrées du monde pour partager les résultats de la recherche et les expériences pertinentes ; contribuer à la conception des agendas futurs des politiques et des sciences ; et explorer les possibilités de réseautage et de collaboration en relation avec les débats engagés. Les deux éditions du forum ont donné naissance à des publications de haute qualité et un ensemble important d'outputs utiles pour les processus décisionnels concernés.

Afin de maintenir le débat dans le contexte et les dynamiques actuels, les organisateurs décident de lancer la troisième édition en mettant l’accent sur le thème: « Changement environnemental global et sécurité humaine: La nécessité d’une nouvelle vision de la science, de la politique et du leadership (changement climatique comme opportunité) ». Cette édition devrait mobiliser un large éventail de participants (académiciens, experts, décideurs, organisations internationales, agences de développement, acteurs du secteur privé, acteurs de la société civile, etc.) dans le but de mettre à jour les connaissances et les perceptions des changements environnementaux causés par les modèles dominants de développement, leurs implications en terme de sécurité humaine, ainsi que les options disponibles pour les sociétés pour répondre aux défis présents et futurs. Les participants examineront comment les paradigmes de la sécurité – tant politique que scientifique – se trouvent dans une transformation à la lumière du changement environnemental global (notamment climatique), et combien urgent et nécessaire est le besoin d’engager une transition – dans les sphères scientifiques, politiques et du leadership – pour gérer efficacement et prudemment les dynamiques actuelles. Ce Congrès contribuera sans doute à la conception de cette feuille de route critique et nécessaire.

PRÉSENTATION

Depuis le Sommet de Rio en 1992, l’agenda du développement durable a été transformé d’une simple aspiration mondiale à un impératif politique avec une dimension humaine. Durant ce processus, le déclin indéniable des conditions des écosystèmes et de leur équilibre a généré une appréciation globale de l'urgence de la gestion des défis posés. Aujourd'hui, les enjeux liés au changement environnemental global sont largement traités au niveau des négociations internationales, du plaidoyer transnational et de la recherche scientifique. Toutefois, et malgré ces acquis, nous n'avons pas encore efficacement traité les impacts socio-écologiques générés par le dilemme du changement climatique, de recul de la biodiversité, de la crise économique, de la pauvreté, et des enjeux et conflits liés à la sécurité alimentaire, sanitaire, énergétique et hydrique dont souffre une part croissante de la population mondiale, notamment dans les régions pauvres et marginalisées.

Et comme le note le Rapport du Secrétaire général de l'ONU sur l’« Harmonie avec la nature » (2010): « L'âge technologique sera accompagné d’un appauvrissement des rapports que les êtres humains ont de tous temps entretenus avec la nature. Celle-ci a été traitée comme un produit qui, dans une large mesure, n’existe qu’au profit de tout un chacun ; de même, tous les problèmes environnementaux peuvent être résolus par un tour de passe-passe technologique. La diminution de la biodiversité, la désertification, le changement climatique et le dérèglement d'un certain nombre de cycles naturels sont parmi les coûts de la désinvolture avec laquelle nous traitons la nature, l'intégrité de ses écosystèmes et les processus de soutien de la vie sur la planète. Comme l’indiquent des travaux scientifiques récents, un certain nombre de frontières planétaires ont été violées, et d'autres risquent de l'être aussi si tout continue dans le monde comme par devant ».

Nous savons actuellement avec des niveaux de certitude croissants qu'il y aura plus de catastrophes dans l'avenir. Or, celles-ci ne domineront plus la une des actualités comme aujourd’hui, tout simplement parce que les conséquences seront cumulatives, moins spectaculaires, mais destructives. Lentement et progressivement, les terres deviendront moins fertiles, avec une productivité décroissante ; la hausse des niveaux des mers portera atteinte aux zones côtières et aux eaux douces ; les espèces continueront de disparaître et les moyens de subsistance se raréfieront davantage. Les cataclysmes occasionnels accentueront de telles tendances. En outre, le changement environnemental global amplifiera les mécanismes qui génèrent les conflits et l'insécurité. Cela pourra se traduire par la déstabilisation et la désintégration qui pourra compromettre la sécurité nationale et internationale.

Sans se projeter dans un futur lointain, plusieurs régions peinent à réaliser actuellement un large éventail de droits humains internationalement reconnus tels que le droit à la santé et même à la vie, les droits à la nourriture, à l'eau, à l’habitat et à la propriété, et les droits relatifs aux moyens de subsistance, à la culture, à la migration, à la réinstallation et à la sécurité personnelle en cas de conflit. Ces interactions sont profondes et complexes, mais les effets les plus pires du changement environnemental sont susceptibles d'être ressentis par les individus et les groupes de pays les plus pauvres dont le niveau de protection de leurs droits est déjà précaire. Comme ils sont déjà vulnérables, ils seront touchés de manière disproportionnée. Par exemple, les plus vulnérables aux impacts du changement climatique, sont les populations les plus pauvres du monde ayant rarement accès aux droits humains les plus élémentaires. Les effets du changement climatique comprennent, entre autres, la détérioration de la santé pouvant entrainer des décès, les sécheresses, les inondations, les vagues de température et de froid extrêmes, les dommages touchant les équipements socio-économiques dans les régions côtières, les impacts négatifs sur l'agriculture et sur la disponibilité des ressources naturelles, ainsi que l'impossibilité de se fier aux sources traditionnelles de nourriture, d’eau et d’énergie.

Il y a peu de doute maintenant que le changement environnemental global a des impacts graves sur le développement des sociétés, et menace sérieusement la capacité des individus et des communautés à réaliser pleinement leur bien-être. Ces impacts pèsent également sur la capacité des nations à honorer leurs engagements internationaux en matière de développement humain. Ainsi, la réflexion sur le changement environnemental dans une perspective éthique et humain n'est pas seulement une nécessité fondamentale pouvant guider notre cadre de politique internationale et nationale de développement, mais nous offre également une occasion inestimable de réévaluer les besoins les plus pressants d'une société mondiale très inégalitaire, avec des gaps très visibles quant aux niveaux de développement social, environnemental et économique.

Cependant, on se réjouit encore de recourir aux approches réductionnistes pour l’évaluation des défis posés et la conception des solutions pouvant atténuer leurs impacts ou s’y adapter. De telles approches ont servi – et continuent de servir – nos réflexions et actions, mais elles ne cessent de rappeler l'extrême complexité du monde qui nous entoure. De cette reconnaissance grandissante de la complexité des défis, des processus et des dynamiques actuels, une reconnaissance correspondante de la nécessité d'une vision novatrice et intégratrice s’impose avec acuité. Une telle vision, basée sur la science, la technologie et les dynamiques sociales, aspire à intégrer un large éventail de parties prenantes dans les processus de décision et d’action selon des modes de gouvernance innovateurs et inclusifs. Le rôle des parties prenantes et du leadership au travers des actions bien informées est au cœur de ce processus. Cette rencontre mettra donc en évidence les champs et les possibilités de ce leadership selon des schémas de partenariat stratégiques et prometteurs.

Si les transformations sociétales nécessaires pour relever les défis du changement environnemental doivent être réalisées, un certain nombre de contraintes importantes doivent être aussi surmontés tout en saisissant les opportunités offertes. Il s'agit notamment de réduire l'inertie dans les systèmes sociaux et économiques; de renforcer les demandes sociales vis-à-vis des gouvernements pour agir sur le changement environnemental ; de réduire les activités avec des émissions potentielles ; de développer les capacités de résilience et d'adaptation ; et de permettre une forte transition des modes inefficaces de gouvernance vers un leadership novateur au sein du gouvernement, du secteur privé et de la société civile. Lier le changement environnemental  aux préoccupations de la production et de la consommation durables, aux questions des droits de l'Homme et aux processus décisionnels inclusifs est crucial pour toute transition des sociétés contemporaines vers des voies durables de développement.

Voir aussi: